par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 3, 9 décembre 2009, 08-20512
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Cour de cassation, 3ème chambre civile
9 décembre 2009, 08-20.512

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Propriété commerciale
Usufruit




LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 2 juillet 2008), que les époux X..., locataire de locaux à usage commercial appartenant en nue-propriété à Mme Y... et à Mme Z... et dont Mme A... détenait l'usufruit, ont, par acte du 28 septembre 2001 notifié à Mme A... tant en son nom personnel que comme représentante de Mme Y... et de Mme Z..., alors mineure représentée par son père, M. Z..., demandé le renouvellement du bail venu à échéance le 30 septembre 2000 ; que Mme A... a, par acte du 23 novembre 2001, refusé le renouvellement du bail et offert le paiement d'une indemnité d'éviction ; que sur requête en référé de Mmes A... et Y... et de Mme Z..., un expert a été désigné pour réunir les éléments nécessaires à la fixation de l'indemnité d'éviction ; que les époux X... ont assigné Mmes A... et Y... et Mme Z... en paiement de l'indemnité d'éviction ; que Mme Y... a invoqué la nullité de la demande de renouvellement qui ne lui a pas été notifiée ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 595, alinéa 4, du code civil, ensemble l'article L. 145-10 du code de commerce ;

Attendu que pour dire nul et de nul effet, l'acte de refus de renouvellement du bail notifié avec offre d'une indemnité d'éviction par Mme A..., usufruitière, l'arrêt retient que cet acte est subséquent à la demande de renouvellement, elle-même nulle et de nul effet ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'usufruitier d'un immeuble à usage commercial donné à bail a le pouvoir de délivrer seul un congé au preneur et que le refus de renouvellement a les mêmes effets qu'un congé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit nul et de nul effet le refus de renouvellement du bail notifié par acte du 23 novembre 2001, l'arrêt rendu le 2 juillet 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne Mmes A... et Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mmes A... et Y..., ensemble, à payer aux consorts X... la somme de 2 500 euros ; rejette les demandes de Mmes A... et Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille neuf.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour les consorts X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul et de nul effet le refus de renouvellement de bail signifié le 23 novembre 2001 aux époux X..., et d'AVOIR en conséquence débouté les consorts X... de leur demande en versement d'une indemnité d'éviction ;

AUX MOTIFS QUE le Tribunal de grande instance de MOULINS n'a pas statué sur la demande en nullité de l'acte de renouvellement de bail délivré par les époux X... suivant acte d'huissier du 28 septembre 2001, prétention dont il était cependant saisi ; qu'au soutien de leurs demandes tendant à voir déclarer les consorts X... irrecevables et mal fondés en leur appel, Madame C... veuve A... et Madame Y... reprennent ce moyen de nullité, combattu par les appelants sous prétexte de l'existence d'un mandat apparent, moyen sur lequel il appartient à la Cour d'appel de se prononcer ; qu'il est constant que les lieux litigieux, dont Madame veuve A... est usufruitière, appartiennent en indivision à Madame Y... et à Mademoiselle Claire Z... devenue majeure le 15 juin 2001, soit à une date antérieure à la demande de renouvellement de bail présentée par acte en date du 28 septembre 2001 ; qu'il s'ensuit qu'en application de l'article L. 145-10 du Code de commerce, les époux X..., locataires, devaient adresser leur demande de renouvellement de bail à l'un des indivisaires, à moins que dans le bail ou par notification expresse, il n'ait été imposé au locataire de signifier la demande renouvellement à chaque propriétaire indivis ; qu'en l'occurrence le contrat de bail ne l'exigeait pas ; que l'article L. 145-10 du Code de commerce offre également la faculté d'adresser la demande au gérant lequel est réputé avoir qualité pour la recevoir ; que toutefois en l'espèce rien n'indique que Madame veuve A... aurait eu la qualité de "gérant" au sens de ce texte ; qu'en fait les époux X... ont adressé leur demande de renouvellement uniquement à Madame veuve A..., prise en sa qualité d'usufruitière et de mandataire des nus-propriétaires ; qu'aucun acte n'a été remis à ces dernières lesquelles n'avaient confié à Madame veuve A... aucun mandat spécial à cet effet ; que les consorts X... ne sauraient sérieusement se prévaloir de la théorie de l'apparence alors que les énonciations de l'acte notarié de renouvellement de bail permettaient de connaître précisément l'identité, les qualités et les droits de chacune des parties ; (…) qu'alors que Madame veuve A... n'avait reçu aucun mandat spécial à cet effet et qu'aucun élément ne pouvait permettre aux époux X... de croire qu'elle aurait disposé d'un tel mandat nullement évoqué, le fait que se méprenant sur l'étendue de ses pouvoirs, cette dernière ait pris l'initiative de faire délivrer un refus de renouvellement avec offre d'indemnité d'éviction par acte du 23.11.2001, établi en son nom et au nom des nues-propriétaires, n'a pas pu régulariser le vice affectant l'acte de renouvellement établi par les époux X... ; que seules les interventions des deux nues-propriétaires acceptant de valider ces actes auraient permis d'éviter leur annulation ; qu'en l'occurrence Madame Y..., informée au cours de l'expertise des actes relatifs au renouvellement du bail, a pris soin aussitôt d'adresser un dire pour indiquer d'une part qu'elle n'entérinait pas ces procédures et soulever d'autre part les nullités encourues ; que Mademoiselle Z... n'est intervenue à aucun stade de l'instance, n'a pas constitué avoué en appel, de telle sorte que l'on ne saurait déduire de son silence un quelconque accord susceptible d'emporter régularisation de la procédure ; qu'en conséquence il convient de déclarer nulle et de nul effet la demande de renouvellement de bail présentée par les époux X... par acte en date du 28.09.2001 ainsi que tous les actes subséquents, notamment le refus de renouvellement avec offre d'indemnité d'éviction du 23.11.2001 ; que la demande en paiement d'indemnité d'éviction présentée par les consorts X... s'avère dépourvue de fondement juridique ; qu'elle a été à bon droit rejetée par les premiers juges ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE les locaux donnés à bail aux époux X... sont des biens indivis des consorts A..., Madame C... étant usufruitière, Madame A... épouse Y... et Mademoiselle Claire Z... en étant nus-propriétaires ; qu'aux termes de l'article 815-3 du Code civil, "les actes d'administration et de disposition relatifs aux biens indivis requièrent le consentement de tous les indivisaires ; que ceux-ci peuvent donner à l'un ou à plusieurs d'entre eux un mandat général d'administration ; qu'un mandat spécial est nécessaire pour tout acte qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis, ainsi que pour la conclusion et le renouvellement des baux ; que si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d'administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux" ; qu'en l'espèce le refus de renouvellement de bail a été signifié aux consorts X... par acte d'huissier du 23 novembre 2001, par Marie-Thérèse C... agissant tant en son nom personnel qu'au nom et comme mandataire d'Hélène Geneviève A... épouse Y... et de Christian Z... agissant tant en son nom personnel que comme administrateur légal sous contrôle judiciaire de sa fille mineure Claire Z... ; que Madame C..., qui n'avait pas qualité pour agir seule, ne démontre pas qu'Hélène Geneviève A... et Claire Z... (alors majeure) lui avaient donné pouvoir spécial pour refuser le renouvellement de ce bail ; qu'au contraire, sa fille affirme que cette opération a été effectuée à son insu ; que dès lors le refus de renouvellement de bail signifié le 23 novembre 2001 doit être déclaré nul, les époux X... qui connaissaient l'identité de tous les co-indivisaires et qui avaient dès lors l'obligation de vérifier l'étendue des pouvoirs de Madame C..., n'étant pas fondés à invoquer la théorie de l'apparence ; qu'ils seront donc déboutés de leur demande d'indemnité d'éviction ;

1°) ALORS QUE l'usufruitier jouit de tous les droits dont le propriétaire jouit et il en jouit comme le propriétaire lui-même ; que la demande de renouvellement d'un bail commercial devant être signifiée par le locataire "au bailleur", et, s'il y a plusieurs propriétaires, la demande adressée à l'un d'eux valant, sauf stipulations ou notifications contraires, à l'égard de tous, est régulière et est opposable aux nus-propriétaires la demande de renouvellement signifiée au seul usufruitier, partie au bail en qualité de bailleur avec les nus-propriétaires ; qu'en déclarant nulle la demande de renouvellement de bail des époux X... pour la raison qu'elle avait été signifiée à Madame veuve A... "prise en sa qualité d'usufruitière et de mandataire des nus-propriétaires" qui n'avaient confié à Madame veuve A... aucun mandat à cet effet, la Cour d'appel a violé les articles 578 et 597 du Code civil et L. 145-10 du Code de commerce ;

2°) ALORS QUE la demande de renouvellement de bail signifiée le 28 septembre 2001 par les époux X... l'ayant été "à Madame Marie Thérèse C... Veuve A... (…) prise tant en son nom personnel qu'en tant que représentant Mme Hélène A... épouse Y..., M. Christian Z... et Melle Claire Z...", la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet acte en énonçant, pour le déclarer nul, que "les époux X... ont adressé leur demande de renouvellement uniquement à Madame Veuve A... prise en sa qualité d'usufruitière", et a violé l'article 1134 du Code civil ;

3°) ALORS QUE l'acte de renouvellement de bail du 28 janvier 1992 ne mentionnant pas que les bailleurs sont l'une usufruitière, les autres nus-propriétaires, la Cour d'appel a dénaturé cet acte en énonçant que ses énonciations "permettaient de connaître précisément l'identité, les qualités et les droits de chacune des parties" et a ainsi violé de l'article 1134 du Code civil ;

4°) ALORS QUE l'usufruitier pouvant donner seul congé au locataire, tandis que le nu-propriétaire ne peut pas, seul, renouveler le bail, la demande de renouvellement de bail signifiée au seul usufruitier, à la supposer irrégulière, est sans influence sur la validité du refus de renouvellement notifié par l'usufruitier ; qu'en déduisant de ce que la demande de renouvellement de bail signifiée par les époux X... à Madame veuve A..., usufruitière, et non aux nus-propriétaires, était entachée de nullité, la conséquence qui ne s'en évince nullement que le refus de renouvellement opposé par Madame veuve A... à cette demande était également nulle, la Cour d'appel a violé les articles 595 du Code civil et L. 145-10 du Code de commerce ;

5°) ALORS QU 'il n'existe pas d'indivision entre l'usufruitier et le nu-propriétaire dont les droits sont de nature différente, et que si l'usufruitier ne peut donner à bail un immeuble à usage commercial sans le concours du nu-propriétaire, il peut délivrer seul un congé au preneur ; qu'en déclarant nul par application de l'article 815-3 du Code civil le refus de renouvellement de bail signifié par Madame C... veuve A..., usufruitière, sans le concours des nus-propriétaires, pour la raison que le bail portait sur un bien indivis, les juges du fond ont violé ce texte par fausse application et, par refus d'application, les articles 582 et 584 du même Code.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nul et de nul effet le refus de renouvellement de bail signifié le 23 novembre 2001 aux époux X..., et d'AVOIR en conséquence débouté les consorts X... de leur demande en versement d'une d'indemnité d'éviction ;

AUX MOTIFS QU'en fait les époux X... ont adressé leur demande de renouvellement uniquement à Madame veuve A..., prise en sa qualité d'usufruitière et de mandataire des nus-propriétaires ; qu'aucun acte n'a été remis à ces dernières lesquelles n'avaient confié à Madame veuve A... aucun mandat spécial à cet effet ; que les consorts X... ne sauraient sérieusement se prévaloir de la théorie de l'apparence alors que les énonciations de l'acte notarié de renouvellement de bail permettaient de connaître précisément l'identité, les qualités et les droits de chacune des parties ; (…) qu'alors que Madame veuve A... n'avait reçu aucun mandat spécial à cet effet et qu'aucun élément ne pouvait permettre aux époux X... de croire qu'elle aurait disposé d'un tel mandat nullement évoqué, le fait que se méprenant sur l'étendue de ses pouvoirs, cette dernière ait pris l'initiative de faire délivrer un refus de renouvellement avec offre d'indemnité d'éviction par acte du 23.11.2001, établi en son nom et au nom des nues-propriétaires, n'a pas pu régulariser le vice affectant l'acte de renouvellement établi par les époux X... ; que seules les interventions des deux nus-propriétaires acceptant de valider ces actes auraient permis d'éviter leur annulation ; qu'en l'occurrence Madame Y..., informée au cours de l'expertise des actes relatifs au renouvellement du bail, a pris soin aussitôt d'adresser un dire pour indiquer d'une part qu'elle n'entérinait pas ces procédures et soulever d'autre part les nullités encourues ; que Mademoiselle Z... n'est intervenue à aucun stade de l'instance, n'a pas constitué avoué en appel, de telle sorte que l'on ne saurait déduire de son silence un quelconque accord susceptible d'emporter régularisation de la procédure ; qu'en conséquence il convient de déclarer nulle et de nul effet la demande de renouvellement de bail présentée par les époux X... par acte en date du 28.09.2001 ainsi que tous les actes subséquents, notamment le refus de renouvellement avec offre d'indemnité d'éviction du 23.11.2001 ; que la demande en paiement d'indemnité d'éviction présentée par les consorts X... s'avère dépourvue de fondement juridique ; qu'elle a été à bon droit rejetée par les premiers juges ;

1°) ALORS QU'il résulte du jugement déféré à la Cour d'appel que Mademoiselle Claire Z... était partie en première instance et qu'elle avait conclu pour contredire les affirmations de Madame Y... selon lesquelles Madame veuve A... n'aurait disposé d'aucun pouvoir des nus-propriétaires pour recevoir la demande de renouvellement de bail des époux X... et refuser ce renouvellement ; qu'en énonçant, pour déclarer nulle la demande de renouvellement du bail et le refus de renouvellement, "que Mademoiselle Z... n'est intervenue à aucun stade de l'instance, n'a pas constitué avoué en appel, de telle sorte que l'on ne saurait déduire de son silence un quelconque accord susceptible d'emporter régularisation de la procédure", la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU 'en énonçant que "Madame Y..., informée au cours de l'expertise des actes relatifs au renouvellement du bail, a pris soin aussitôt d'adresser un dire pour indiquer d'une part qu'elle n'entérinait pas ces procédures et soulever d'autre part les nullités encourues", pour considérer que Madame Y... n'avait pas validé la demande de renouvellement de bail des époux X... et le refus de renouvellement notifié par Madame veuve A..., sans répondre aux conclusions des consorts X... qui faisaient valoir que l'assignation en référé en désignation d'expert aux fins d'évaluer l'indemnité d'éviction due aux époux X... en conséquence du refus de renouvellement de leur bail avait été délivrée notamment au nom de Madame Y..., et l'ordonnance rendue à sa requête, ce qui excluait que Madame Y... n'ait pu avoir connaissance des actes relatifs au renouvellement du bail qu'"au cours de l'expertise", la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Propriété commerciale
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Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.