par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 7 septembre 2010, 09-66284
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Cour de cassation, chambre commerciale
7 septembre 2010, 09-66.284

Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil et l'article L. 642-19 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu que la vente de gré à gré d'un élément de l'actif mobilier du débiteur en liquidation judiciaire est parfaite dès l'ordonnance du juge-commissaire qui l'autorise, sous la condition suspensive que la décision acquière force de chose jugée ; que la vente n'est réalisée que par l'accomplissement d'actes postérieurs à la décision du juge-commissaire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que le 2 janvier 2006, la SCI Aroumic (la SCI) a donné un immeuble en location à usage commercial à la société Lauragais centre auto (la société Lauragais) ; que le bail stipulait un droit de préemption au profit du bailleur en cas de cession du fonds de commerce quelle qu'en soit la forme, le preneur devant notifier au bailleur le projet d'acte de cession en lui indiquant l'identité et l'adresse de l'acquéreur, le prix et les modalités de paiement ainsi que les jour et heure prévus pour la réalisation de la cession ; que la société Lauragais a été mise en liquidation judiciaire le 3 novembre 2006, M. X... étant désigné liquidateur ; que par ordonnance du 8 décembre 2006, le juge-commissaire a autorisé M. X..., ès qualités, à céder de gré à gré le fonds de commerce de la société Lauragais à M. Y... moyennant le prix de 30 000 euros ; que le tribunal a rejeté l'opposition de la SCI à cette ordonnance ;


Attendu que pour infirmer le jugement et annuler l'ordonnance du juge-commissaire, l'arrêt, après avoir énoncé que cette ordonnance marque la rencontre des consentements du cédant et du cessionnaire sur la chose cédée et sur le prix ce qui rend la vente parfaite à la date à laquelle l'ordonnance est rendue, retient que la décision du juge-commissaire ne pouvait intervenir qu'après purge du droit de préemption contractuel au profit de la bailleresse qui n'a pu commettre de faute en formant opposition à une ordonnance sur requête rendue sans qu'elle en fût avisée, ni mise en mesure d'avaliser le projet de cession ou de faire connaître son intention de se prévaloir de son droit réservé au bail toujours en cours, les modalités prévues au contrat de bail pour l'exercice du droit de préemption n'étant applicables qu'en cas de cession conventionnelle hors contrôle d'un juge statuant contradictoirement ; que l'arrêt en déduit que, faute d'avoir respecté le droit réservé de la bailleresse, la procédure de cession de gré à gré intervenue dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Lauragais est irrégulière ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le bailleur ne pouvait, aux termes mêmes de la clause stipulant le droit de préemption, applicable quelles que soient les formes de la cession, prendre position qu'à compter de la signification qui devait lui être faite du projet d'acte de cession, et que l'exercice du droit de préemption était subordonné au caractère irrévocable de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé la cession de gré à gré du fonds de commerce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé le jugement en ce qu'il avait déclaré recevable l'opposition formée par la SCI le 18 décembre 2006 à l'encontre de l'ordonnance rendue le 8 décembre 2006 par le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la société Lauragais centre auto, l'arrêt rendu le 17 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;

Condamne la société Aroumic aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament, avocat aux Conseils pour M. X...

Maître X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé l'annulation de l'ordonnance rendue le 8 décembre 2006 qui l'autorisait à céder de gré à gré le fonds de commerce de la société Lauragais centre auto et de l'avoir débouté de sa demande indemnitaire présentée contre la société Aroumic ;

AUX MOTIFS QUE contrairement à ce que soutient Maître X... et à ce qu'ont à tort retenu les premiers juges, l'ordonnance attaquée marque la rencontre des consentements du cédant et du cessionnaire sur la chose cédée et son prix, ce qui rend parfaite la dite cession à la date où la dite décision a été rendue ; or, celle-ci ne pouvait intervenir qu'après purge du droit de préemption contractuel inséré au bail au profit de la bailleresse qui n'a pu commettre de faute en formant opposition à une ordonnance sur requête rendue sans qu'elle en soit avisée ni mise en mesure d'avaliser le projet de cession ou de faire connaître son intention de se prévaloir de son droit réservé au bail toujours en cours, les modalités prévues à ce contrat pour l'exercice de ce droit n'étant applicables qu'en cas de cession conventionnelle hors procédure collective et donc hors contrôle d'un juge statuant contradictoirement ; que faute d'avoir respecté le droit réservé de la bailleresse, droit qui s'imposait non pas au cessionnaire mais au cédant et au juge commissaire, la procédure de cession de gré à gré intervenue dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL LAURAGAIS CENTRE AUTO est irrégulière et l'ordonnance attaquée qui en est l'aboutissement doit être annulée ; que le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef ; que la demande dite reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour faute est infondée dans la mesure où la SCI AROUMIC n'a commis aucune faute dans l'exercice de ses droits et qu'au contraire l'échec de la cession doit être imputée à la légèreté du mandataire liquidateur de la SARL LAURAGAIS CENTRE AUTO et à l'erreur de droit du juge commissaire qui pouvaient éviter la situation dont M. Y... d'une part mais aussi les créanciers de la liquidation judiciaire de la SARL LAURAGAIS CENTRE AUTO ont été les victimes, en lisant tout simplement le bail dont la cession a été trop rapidement et sans précaution ordonnée ; que Maître X... ès qualité sera donc débouté de sa demande en dommages et intérêts ;


ALORS QUE dans le cadre d'une liquidation judiciaire, le délai d'exercice par le bailleur du droit de préemption stipulé au bail débute lorsque l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé la cession de gré à gré a acquis un caractère irrévocable ; que dès lors, en affirmant, pour annuler l'ordonnance du juge-commissaire de la liquidation de la société Lauragais centre auto ayant autorisé la cession de gré à gré de son fonds de commerce à monsieur Y..., que l'ordonnance ne pouvait intervenir qu'après la purge du droit de préemption stipulé au bail liant la société en liquidation à la société Aroumic, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 642-19 (ancien) du code de commerce.



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Cette décision est visée dans la définition :
Propriété commerciale


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.